LE PROCESSUS DE LIQUIDATION D’UNE SUCCESSION

La charge d’un liquidateur agissant à l’égard des biens de la succession n’est pas sans défi, car la loi lui impose d’agir avec prudence et diligence dans le cadre de l’administration des biens de la succession. Dans le cas contraire, sa responsabilité personnelle pourrait être entrainée quant aux dettes du défunt.

D’emblée, le liquidateur est d’une succession est généralement désigné par une disposition testamentaire. Toutefois, dans le cas où un testament n’aurait pas réglé la question, la charge de liquidateur incombe de plein droit aux héritiers. En effet, en vertu de l’article 785 du Code civil du Québec (C.c.Q.), les héritiers peuvent désigner, à la majorité, et pourvoir au mode de remplacement.

Les lignes qui suivent consistent en un résumé des responsabilités d’un liquidateur relativement à la liquidation et au règlement d’une succession.

  1. L’identification des successibles potentiels

Les héritiers sont soit expressément désignés dans une disposition testamentaire ou, dans l’absence d’un testament, sont déterminés suivant les règles de la dévolution successorale (articles 653 et ss. C.c.Q.). Dans l’éventualité où il n’y a aucun héritier connu et vivant, ou dans le cas où les héritiers connus ont renoncé à la succession ou ne la réclament, l’État recueille, de plein droit, les biens de la succession qui sont situés au Québec.

Tous les héritiers et les créanciers ont le droit de recevoir une copie du testament. À tout le moins, un héritier pourrait tout simplement recevoir le passage où il est fait mention de sa qualité d’héritier.

Pour toutes les autres personnes voulant recevoir communication ou délivrance d’un acte notarié ou d’un extrait de ce dernier, ils peuvent se renseigner directement auprès du notaire instrumentaire.

En vertu des articles 484 et 485 du Code de procédure civile (C.p.c.), ces derniers seraient en mesure de recevoir une copie du testament. Plus de plus amples renseignements à ce sujet, nous vous invitons à consulter notre article sur les nouvelles règles en matière successorale dans le nouveau Code de procédure civile en cliquant sur le lien suivant.

  1. L’obligation d’avertir les parties intéressées du décès du défunt

Il est primordial de notifier certaines personnes et certaines entités au moment du décès du défunt afin que toute activité en lien avec les comptes du défunt cesse, notamment :

a) Les fournisseurs de service (par exemple, services téléphoniques, d’internet et de télévision satellite, cartes de crédit, etc.)

b) Entités gouvernementales (par exemple, la Régie des rentes du Québec, la Régie de l’assurance maladie du Québec, etc.) 

  1. La détermination des actifs et du passif de la succession

 Un liquidateur est tenu de préparer un inventaire du patrimoine du défunt, qui doit comprendre l’énumération fidèle et exacte de tous les biens qu’il est chargé d’administrer ou qui forment le patrimoine administré.

Conformément à l’article 1326 C.c.Q., un inventaire doit comprendre ce qui suit :

a) Une description des immeubles et celle des meubles, avec indication e leur valeur et, s’il s’agit d’une universalité de biens meubles, une identification suffisante de cette universalité;

b) La désignation des espèces en numéraire et des autres valeurs;

c) L’énumération des documents de valeur;

d) Un état des dettes évaluées au moment du décès du défunt; et

e) La récapitulation de l’actif et du passif.

L’inventaire est fait par acte notarié en minute ou peut être fait sous seing privé en présence de deux témoins (article 1327 C.c.Q.).

Une copie de l’inventaire doit être fournie aux bénéficiaires de l’administration et ainsi qu’à toute autre personne dont l’intérêt lui est connu (article 1330 C.c.Q.).

Par ailleurs, la clôture de l’inventaire est publiée au registre des droits personnels et réels mobiliers (ci-après désigné comme « RDPRM ») et dans un journal distribué dans la localité de la dernière adresse connue du défunt (article 795 C.c.Q.). Il semble bon de mentionner que la clôture n’est qu’une indication qu’un inventaire a été préparé, mais ne consiste révèle pas le contenu d’un tel inventaire.

En vertu de l’article 799 C.c.Q., le liquidateur ne peut être dispensé de faire inventaire que si tous les héritiers et les successibles y consentent.

  1. Le recouvrement de créances

Le liquidateur a l’obligation de recouvrer toute créance liquide et exigible qu’a le défunt au moment de son décès et doit déposer les sommes reçues dans le compte bancaire de la succession étant donné que ces dernières profitent à la succession.

Plus particulièrement, le liquidateur doit récupérer notamment pour la succession les sommes relatives aux gains liés à l’emploi, les prestations provenant de régime privé de retraite et le produit d’assurance-vie.

  1. Le paiement des dettes et des legs particuliers

Dans le cadre de son administration de la succession, le liquidateur poursuit la réalisation des biens de cette dernière, dans la mesure nécessaire au paiement des dettes et des legs particuliers (article 804 C.c.Q.). Il peut, en conséquence, aliéner seul le bien meuble susceptible de dépérir, de se déprécier rapidement ou dispendieux à conserver. Il peut aussi, avec le consentement des héritiers ou, à défaut, avec l’autorisation du tribunal, aliéner les autres biens de la succession.

a) Lorsque la succession est manifestement solvable

Le liquidateur paie les créanciers et les légataires particuliers connus, au fur et à mesure qu’ils se présentent (article 808 al.1 C.c.Q.). Il faut toutefois prendre note que le liquidateur paie, comme tout autre dette, la prestation compensatoire du conjoint survivant ou toute autre créance résultant de la liquidation des droits patrimoniaux des époux ou conjoints unis civilement (article 809 C.c.Q.).

Par conséquent, la loi ne prévoit pas nécessairement un ordre de paiement lorsque la succession est manifestement solvable.

Toutefois, une exception existe quant au paiement des comptes usuels d’entreprises de services publics et au remboursement de dettes qui demeurent payables à terme, suivant leur exigibilité ou les modalités convenues.

Par ailleurs, des acomptes peuvent être versés aux créanciers d’aliments et aux héritiers et légataire particuliers de sommes d’argent, mais ces acomptes s’imputent sur la part de ceux qui en bénéficient (article 807 C.c.Q.).

b) Lorsque les biens de la succession sont insuffisants

La situation en est une autre lorsque le patrimoine a plus de dettes que d’actifs. Dans un tel scénario, à la lumière de l’article 811 C.c.Q., le liquidateur a l’obligation de :

i) Dresser un état complet de la succession et en notifier toutes les parties intéressées;

ii) Obtenir un jugement homologuant/vérifiant une proposition de paiement dans laquelle, s’il y a lieu, une provision est prévue pour acquitter un jugement éventuel; et

iii) Aliéner un bien légué à titre particulier ou réduire les legs particuliers si les autres biens sont insuffisants pour payer toutes les dettes (article 813 C.c.Q.). 

Par ailleurs, le liquidateur ne peut payer les dettes de la succession ni les legs particuliers avant l’expiration d’un délai de soixante (60) à compter de l’inscription de l’avis de clôture de l’inventaire (article 810 al.1 C.c.Q.).

En ce qui concerne l’ordre selon lequel les parties concernées sont payées conformément à la proposition de paiement retrouvé à l’article 811 C.c.Q., l’article 812 C.c.Q. prévoit que le paiement est fait de la manière suivante :

i) D’abord, le liquidateur paie les créanciers prioritaires ou hypothécaires, suivant leur rang;

ii) Il paie ensuite les autres créanciers, sauf pour leur créance alimentaire :

– Si le liquidateur ne peut les rembourser entièrement, il les paie en proportion de leur créance;

iii) Dans l’éventualité qu’il reste des biens après avoir payé ces créanciers, le liquidateur paie les créanciers d’aliments, en proportion de leur créance s’il ne peut les payer entièrement; et ensuite

iv) Les légataires particuliers.

– Rappel : les biens légués à titre particulier peuvent être aliénés ou réduits afin de payer les parties qui ont préséance sur les légataires particuliers.

  1. Souscription à une assurance afin de garantir l’exécution de ses obligations

En vertu de l’article 790 C.c.Q., le liquidateur doit soit souscrire à une assurance ou fournir une autre sûreté garantissant l’exécution de ses obligations dans les cas suivants :

a) Lorsque le testateur l’exige et en fait mention dans son testament;

b) Lorsque la majorité des héritiers l’exige; ou

c) Lorsque le tribunal l’ordonne à la demande d’un intéressé qui établit la nécessité d’une telle mesure.

  1. La reddition de compte

a) Le compte annuel

Si la liquidation se prolonge au-delà d’une année, le liquidateur doit rendre un compte annuel de gestion aux héritiers, créanciers et légataires particuliers restés impayés (article 806 C.c.Q.).

Le compte doit être suffisamment détaillé pour qu’on puisse en vérifier l’exactitude (article 1352 al.1 C.c.Q.).

b) Le compte définitif

À la fin de son administration, l’administrateur doit rendre un compte définitif aux bénéficiaires de la succession (article 1363 C.c.Q.).

Ce compte doit également être suffisamment détaillé pour qu’on puisse en vérifier l’exactitude. L’acceptation du compte par le bénéficiaire en opère la clôture.

L’objectif de ce compte est de déterminer l’actif net ou le déficit de la succession.

À ce titre, en vertu de l’article 820 C.c.Q., le compte final doit indiquer ce qui suit :

i) Les dettes et legs restés impayés;

ii) Les dettes garantis par une sûreté ou pris en charge par des héritiers ou légataires particuliers;

iii) Les dettes dont le paiement est autrement réglé, ainsi qu’une précision sur leur mode de paiement; et

iv) Les provisions nécessaires pour exécuter les jugements éventuels.

Une fois le compte définitif accepté, le liquidateur est déchargé de son administration et fait délivrance des biens aux héritiers.

Finalement, la clôture du compte doit être publiée au RDPRM (article 822 al.2 C.c.Q.).

  1. Délivrance des biens

Préalablement à la distribution des biens du défunt, le liquidateur doit se procurer les deux certificats suivants :

i) Un certificat émis par Revenu Québec autorisant ladite distribution; et

– Un Avis de distribution de biens dans le cas d’une succession doit être produit afin d’obtenir ce certificat.

ii) Un certificat de décharge émis par l’Agence du revenu du Canada.

– Le liquidateur doit remplir le formulaire TX19.

Il semble opportun de mentionner que toute distribution faite avant l’obtention de ces certificats peut entrainer la responsabilité personnelle du liquidateur.

Si le liquidateur doit distribuer une somme de plus de 25 000,00$ à une personne mineure, il doit remplir le formulaire intitulé « Déclaration de remise d’un bien au bénéfice d’un enfant mineur » et le faire parvenir au Curateur public.

En ce qui concerne le transfert de propriété d’un véhicule ou d’un immeuble, le liquidateur doit s’assurer de remplir des étapes supplémentaires suivantes afin d’assurer que le transfert soit fait en bonne et due forme :

a) Le véhicule du défunt

Le liquidateur remplir le formulaire « Déclaration du liquidateur d’une succession » de la Société de l’assurance automobile du Québec.

b) Les droits de propriété du défunt sur un immeuble

Le liquidateur doit signer une « Déclaration de transfert » préparée par un notaire.

Par ailleurs, l’administrateur doit remettre tout ce qu’il a reçu dans l’exécution de ses fonctions, même si ce qu’il a reçu n’était pas dû au bénéficiaire ou au patrimoine fiduciaire; il est aussi comptable de tout profit ou avantage personnel qu’il a réalisé en utilisant, sans y être autorisé, l’information qu’il détenait en raison de son administration (article 1366 al.1 C.c.Q.).

Le liquidateur a également le droit de déduire des sommes qu’il doit remettre ce que les héritiers lui doivent en raison de son administration (article 1369 al.1 C.c.Q.).

  1. Dépôt des déclarations de revenu du défunt

Le liquidateur est non seulement responsable du dépôt des déclarations de revenu du défunt au niveau provincial et fédéral pour les années antérieures à son décès, mais également de celle pour l’année du décès.

La date limite pour le dépôt de ces déclarations de revenu et pour le paiement des impôts afférents à ces dernières varie en fonction de la date de décès du défunt et de si ce dernier exploitait une entreprise.

Pour de plus amples renseignements à ce sujet, nous vous invitons à consulter les sites Internet de Revenu Québec et de l’Agence du revenu du Canada.

  1. Dois-je absolument suivre toutes ces étapes?

Les étapes susmentionnées peuvent être évitées si les héritiers décident, d’un commun accord, de liquider la succession sans suivre ces règles.

Toutefois, il faut noter que ces derniers sont tenus au paiement des dettes de la succession sur leur patrimoine propre tout en exonérant le liquidateur de toute responsabilité.

Si vous recherchez un cabinet d’avocat qui propose des honoraires raisonnables, un traitement rapide et efficace de vos dossiers et un suivi personnalisé et efficace, n’hésitez pas à communiquer avec Schneider Avocats au (514) 439-1322 ext. 112 ou par courriel à l’adresse : info@schneiderlegal.com

Le processus présenté ci-dessus ne constitue qu’un outil de référence et ne comporte aucune garantie relative à votre dossier. Nous vous recommandons fortement de recourir aux conseils juridiques d’un avocat, membre en règle du Barreau du Québec. Les particularités propres à chaque cas d’espèce doivent faire l’objet d’une analyse exhaustive puisque le processus peut s’avérer complexe et techniquement difficile.

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