LES RESPONSABILITÉS DU LIQUIDATEUR

La charge d’un liquidateur n’est pas sans défi, car la loi lui impose l’obligation d’agir avec prudence et diligence dans le cadre de l’administration des biens de la succession. Sinon, les héritiers peuvent être tenus responsables des dettes du défunt, et la responsabilité personnelle du liquidateur peut être engagée en cas de négligence.

La suivante consiste en un résumé des responsabilités d’un liquidateur relativement à la liquidation et au règlement d’une succession :

1.         Respecter les vœux du défunt ;

2.         Assurer sa performance si nécessaire ;

3.         Contacter et informer tous les héritiers et personnes intéressées concernées ;

4.         Effectuer les formalités requises par la loi ;

5.         Fermer les comptes bancaires et aviser les fournisseurs de services et les organismes gouvernementaux de cesser toutes activités dans les comptes du défunt ;

6.         Déterminer le contenu de la succession et faire un inventaire ;

7.         Procéder avec le recouvrement de créances ;

8.         Payer les dettes du défunt et des legs particuliers ;

9.         Rendre un compte ;

10.       Dépôt des déclarations de revenu du défunt ; et

11.       Délivrance des biens.

 

1. Respecter les vœux du défunt

Le liquidateur doit respecter le testament et les vœux du défunt afin d’administrer correctement la succession et d’attribuer ce qui est dû aux héritiers.

2. Assurer sa performance si nécessaire

Un liquidateur doit souscrire une assurance ou fournir une autre sûreté garantissant l’exécution de ses obligations dans les cas suivants :[1]

a) Lorsque le testateur l’exige et en fait mention dans son testament;

b) Lorsque la majorité des héritiers l’exige; ou

c) Lorsque le tribunal l’ordonne à la demande d’un intéressé qui établit la nécessité d’une telle mesure.

3. Contacter et informer tous les héritiers et personnes intéressées concernées

Les héritiers sont expressément désignés dans une disposition testamentaire ou, en l’absence d’un testament, déterminés suivant les règles de la dévolution successorale suivant les articles 653 et ss. du Code Civil du Québec (ci-après « CCQ »). Dans l’éventualité qu’il n’y ait aucun héritier connu et vivant, ou que les héritiers connus renoncent à la succession ou ne la réclament, l’État recueille, de plein droit, les biens de la succession qui sont situés au Québec.  Tous les héritiers et créanciers peuvent recevoir une copie du testament. À tout le moins, un héritier peut simplement recevoir une copie du passage dans le testament indiquant son statut d’héritier. Pour tous les autres individus qui ont un intérêt particulier et qui souhaitent avoir accès au testament, ils peuvent directement se renseigner auprès du notaire.

4. Effectuer les formalités requises par la loi

Le liquidateur doit remplir toutes les formalités requises par la loi, telles que l’enregistrement des avis et le respect des délais prescrits.

5. Fermer les comptes bancaires et aviser les fournisseurs de services et les organismes gouvernementaux de cesser toutes activités dans les comptes du défunt

Le liquidateur doit fermer les comptes bancaires du défunt et créer un compte au nom de la succession. Il est également important de notifier certaines personnes et/ou entités au décès du défunt afin que toute activité en lien avec les comptes du défunt cesse, notamment :

a)         Les fournisseurs de services (téléphone, internet, électricité, cartes de crédit, etc.) ; et

b)         Les entités gouvernementales (c’est-à-dire la Régie des rentes du Québec, la Régie de l’assurance maladie du Québec, etc.)

6. Déterminer le contenu de la succession et faire un inventaire

En temps normal, le liquidateur doit, dans les six mois prescrits, dresser l’inventaire des biens du défunt. L’inventaire détermine la valeur de la succession permettant ainsi aux héritiers d’accepter ou de refuser leur part successorale. L’inventaire doit inclure une énumération fidèle et exacte de tous les biens qu’il est chargé d’administrer ou qui forment le patrimoine administré. Conformément à l’article 1326 CCQ, un inventaire doit contenir les éléments suivants :

a)         Une description des immeubles et celles des meubles, avec indication de leur valeur et, s’il s’agit d’une universalité de biens meubles, une identification suffisante de cette universalité ;

b)         La désignation des espèces en numéraires et des autres valeurs ;

c)         L’énumération des documents de valeur ;

d)         L’état des dettes à la date du décès du défunt ; et

e)         Une récapitulation de l’actif et du passif.

L’inventaire est fait par acte notarié en minute ou peut être fait sous seing privé en présence de deux témoins.[2]

Une copie de l’inventaire doit être fournie aux bénéficiaires de la succession et à toute autre personne dont l’intérêt lui est connu.[3]

Le liquidateur doit alors publier la clôture de l’inventaire au RDPRM et dans un journal distribué dans la localité de la dernière adresse connue du défunt.[4] Cet avis permet aux autres parties affectées par la succession (telles qu’une banque ou des prêteurs privés) de s’informer du décès, de consulter l’inventaire, et/ou d’avoir la chance de le contester si nécessaire.

Conformément à l’article 799 CCQ, le liquidateur peut être dispensé de faire l’inventaire si tous les héritiers et successeurs y consentent. Toutefois, dans ce cas, la succession sera présumée acceptée par les héritiers, les rendant ainsi responsables pour les dettes de la succession au-delà de la valeur des biens qui leur sont alloués.

Pour plus d’informations concernant le contenu de l’inventaire, veuillez consulter le formulaire de liquidation de la succession disponible sur notre site

7. Procéder avec le recouvrement de créances.

Tout ce qui est dû au défunt au moment de son décès doit être récupéré par le liquidateur et déposé dans le compte de la succession puisque les biens et sommes recouvrés bénéficient l’ensemble de la succession. Plus particulièrement, le liquidateur doit récupérer les sommes relatives aux gains liés à l’emploi, les prestations provenant d’un régime privé de retraite et le produit d’assurance-vie.

8. Payer les dettes du défunt et des legs particuliers.

Dans le cadre de son administration de la succession, le liquidateur poursuit la réalisation des biens de cette dernière, dans la mesure nécessaire au paiement des dettes (telles que l’impôt sur le revenu, les prêts, le loyer, carte de crédits, etc.) et des legs particuliers. À cet effet, le liquidateur peut aliéner seul les biens meubles susceptibles de dépérir, de déprécier rapidement ou qui sont dispendieux à conserver. Le liquidateur peut aussi, avec le consentement des héritiers ou, à défaut, avec l’autorisation du tribunal, aliéner les autres biens de la succession.

Les autres dépenses telles que les frais funéraires, les frais d’obtention du certificat de décès et les autres frais inhérents à la succession sont également déduits de la succession.

Le liquidateur doit préparer les relevés d’impôt du défunt et payer ses impôts dans le délai prescrit par la loi et obtenir un certificat de Revenu Québec et de l’Agence du revenu du Canada confirmant que le défunt a payé toutes ses taxes.

Le liquidateur doit tenir compte des réclamations de tous les créanciers d’aliments, et des réclamations faites par les enfants, le conjoint ou le partenaire civil du défunt telles que les pensions alimentaires, la répartition de la valeur des biens accumulés pendant le mariage ou l’union civile, et les compensations pour le travail accompli pendant le mariage ou l’union civile au profit du défunt.

Il est important que le liquidateur conserve toutes les preuves de paiements faits dans le cadre de ses fonctions.

I) Lorsque la succession est manifestement solvable.

Le liquidateur paie les créanciers et les légataires connus, au fur et à mesure qu’ils se présentent.[5] Il faut toutefois prendre note que le liquidateur paie, comme tout autre dette, la prestation compensatoire du conjoint survivant ou toute autre créance résultant de la liquidation des droits patrimoniaux des époux ou conjoints unis civilement.[6]

Par conséquent, la loi ne prévoit pas nécessairement une hiérarchie concernant l’ordre de paiement lorsque la succession est manifestement solvable.

Toutefois, une exception existe quant au paiement des comptes usuels d’entreprises, de services publics et au remboursement de dettes qui demeurent payables à terme, suivant leur exigibilité ou les modalités convenues. [7]

Par ailleurs, des acomptes peuvent être versées aux créanciers d’aliments et aux héritiers et légataires particuliers de sommes d’argent, mais ces acomptes seront déduits de leur part.[8]

Pour plus d’informations concernant la distribution partielle d’une succession, veuillez consulter le jugement ci-joint.

II) Lorsque la succession est manifestement insolvable.

La situation en est une autre lorsque le patrimoine a plus de dettes que d’actifs. Dans un tel scénario, le liquidateur a l’obligation :[9]

a) De dresser un état complet de la succession et d’en notifier toutes les parties intéressées;

b) Obtenir un jugement vérifiant une proposition de paiement selon laquelle, s’il y a lieu, une provision prévue pour acquitter un jugement éventuel; et

c) Aliéner des biens légués à titre particulier ou réduire les legs particuliers si les autres biens sont insuffisants pour payer toutes les dettes.[10]

Par ailleurs, le liquidateur ne peut payer les dettes de la succession ni les legs particuliers avant l’expiration d’un délai de soixante jours à compter de l’inscription de l’avis de clôture de l’inventaire.[11]

L’article 812 CCQ précise l’ordre dans lequel les parties doivent être payées conformément à la proposition de paiement retrouvé à l’article 811 CCQ :

1. D’abord, le liquidateur paie les créanciers prioritaires ou hypothécaires suivant leur rang;

2. Ensuite, il paie les autres créanciers, sauf pour leur créance alimentaire;

  • Si le liquidateur est incapable de les rembourser entièrement, il les paie en proportion de leurs créances;

3. Dans l’éventualité qu’il reste des biens après avoir payé les créanciers mentionnés ci-dessus, le liquidateur paie les créanciers d’aliments en proportion de leur créance s’il ne peut les payer entièrement; et ensuite

4. Les légataires par titre particulier.

  • Rappel: Les biens légués à titre particulier peuvent être aliénés ou réduits afin de payer les parties qui ont préséance sur les légataires à titre particulier.

Les héritiers qui désirent renoncer à la succession doivent le faire par document notarié.

9. Rendre un compte.

a) Le compte annuel.

Si la liquidation se prolonge au-delà d’une année, le liquidateur doit rendre un compte annuel de gestion aux héritiers, créanciers et légataires particuliers restés impayés.[12]

Le compte doit être suffisamment détaillé pour qu’on puisse en vérifier l’exactitude.[13]

b) Le compte définitif.

À la fin de son administration, l’administrateur doit rendre un compte définitif aux bénéficiaires de la succession.[14]

Ce compte doit également être suffisamment détaillé pour qu’on puisse en vérifier l’exactitude. L’acceptation du compte par le bénéficiaire en opère la clôture.

Un plan pour diviser la propriété est normalement attaché au compte final. Ce plan peut être rédigé avec l’aide d’un professionnel pour minimiser les conséquences fiscales inhérentes au transfert de certains biens.

L’objectif de ce compte est de déterminer l’actif net ou le déficit de la succession.

À ce titre, en vertu de l’article 820 CCQ le compte final doit indiquer ce qui suit :

a) Les dettes et legs restés impayés;

b) Les dettes garanties par une sûreté ou prises en charge par des héritiers ou légataires particuliers;

c) Les dettes dont le paiement est autrement réglé, ainsi qu’une précision sur leur mode de paiement; et

d) Les provisions nécessaires pour exécuter les jugements éventuels.

Une fois le compte définitif accepté, le liquidateur est déchargé de son administration et délivre les biens aux héritiers.

Finalement, la clôture du compte doit être publiée au RDPRM.[15]

10. Dépôt des déclarations de revenu du défunt.

Le liquidateur est responsable du dépôt des déclarations de revenu du défunt au niveau provincial et fédéral pour les années antérieures au décès, mais ainsi que pour l’année du décès.

La date limite du dépôt des déclarations de revenu et du paiement des impôts afférents varie en fonction de la date de décès du défunt et si ce dernier exploitait une entreprise.

Pour de plus amples renseignements à ce sujet, nous vous invitons à consulter les sites web de Revenu Québec et l’Agence du revenu du Canada.

11. Certificat de décharge.

Préalablement à la distribution des biens du défunt, le liquidateur doit se procurer les deux certificats suivants :

a) Un certificat émis par Revenu Québec autorisant ladite distribution; et

  • Un Avis de distribution de biens dans le cas d’une successiondoit être produit afin d’obtenir ce certificat.

b) Un certificat de décharge émis par l’Agence du revenu du Canada.

  • Le liquidateur doit remplir le formulaire TX19.

Il semble opportun de mentionner que toute distribution faite avant l’obtention de ces certificats peut entrainer la responsabilité personnelle du liquidateur.

Dans certaines circonstances exceptionnelles, une distribution partielle de l’argent peut être distribuée aux héritiers avant la remise des certificats de décharge. Pour plus d’informations, veuillez consulter le jugement ci-joint.

Si le liquidateur doit distribuer une somme de plus de 25 000,00$ à une personne mineure, il doit remplir le formulaire intitulé « Déclaration de remise d’un bien au bénéfice d’un enfant mineur » et le faire parvenir au curateur public.

En ce qui concerne le transfert de propriété d’un véhicule ou d’un immeuble, le liquidateur doit s’assurer de remplir des étapes supplémentaires suivantes afin d’assurer que le transfert soit fait en bonne et due forme :

a) Le véhicule du défunt

Le liquidateur doit remplir le formulaire « Déclaration du liquidateur d’une succession » de la Société de l’assurance automobile du Québec.

b) Les droits de propriété du défunt sur un immeuble

Le liquidateur doit signer une « Déclaration de transfert » préparée par un notaire.

Par ailleurs, l’administrateur doit remettre tout ce qu’il a reçu dans l’exécution de ses fonctions, même si ce qu’il a reçu n’était pas dû au bénéficiaire ou au patrimoine fiduciaire; il est aussi responsable de tout profit ou avantage personnel qu’il a réalisé en utilisant, sans y être autorisé, l’information qu’il détenait en raison de son administration.[16]

Le liquidateur a également le droit de déduire, des sommes qu’il doit remettre, ce que les héritiers lui doivent en raison de son administration.[17]

Dois-je absolument suivre toutes ces étapes?

Les étapes susmentionnées peuvent être évitées si les héritiers décident, d’un commun accord, de liquider la succession sans suivre ces règles.

Toutefois, il faut noter que ces derniers seront tenus au paiement des dettes de la succession qui dépassent leur part successorale tout en exonérant le liquidateur de toute responsabilité.

[1] Ibid art. 790.

[2] Ibid art. 1327.

[3] Ibid art. 1330.

[4] Ibid art. 795.

[5] Ibid art. 808 para 1.

[6] Ibid at para 2.

[7] Ibid.

[8] Ibid art. 807.

[9] Ibid art. 811.

[10] Ibid art. 813.

[11] Ibid art. 810 para 1.

[12] Ibid art. 806.

[13] Ibid art. 1352 para 1.

[14] Ibid art. 1363.

[15] Ibid art. 822 para 2.

[16] Ibid art. 1366 para 1.

[17] Ibid art. 1369 para 1.

Si vous recherchez un cabinet d’avocat qui propose des honoraires raisonnables, un traitement rapide et efficace de vos dossiers et un suivi personnalisé et efficace, n’hésitez pas à communiquer avec Schneider Avocats au (514) 439-1322 ext. 112 ou par courriel à l’adresse : info@schneiderlegal.com

Le processus présenté ci-dessus ne constitue qu’un outil de référence et ne comporte aucune garantie relative à votre dossier. Nous vous recommandons fortement de recourir aux conseils juridiques d’un avocat, membre en règle du Barreau du Québec. Les particularités propres à chaque cas d’espèce doivent faire l’objet d’une analyse exhaustive puisque le processus peut s’avérer complexe et techniquement difficile.

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