CLAUSE DE NON-CONCURRENCE (art. 2089 et 2095 du Code civil du Québec)

L’employeur peut trouver que les garanties de loyauté imposées par l’art. 2088 du Code civil du Québec ne sont pas suffisantes et peut, par conséquent, requérir dans l’entente contractuelle dès le début l’inclusion d’une clause de non-concurrence de ne pas lui faire concurrence. Si le salarié acquiesce à l’inclusion d’une telle clause, en principe, cette clause a force obligatoire et empêcherait le salarié, une fois le lien d’emploi terminé, de faire concurrence à l’employeur, sous réserve des limitations de la loi.

 a. Définition de la clause de non-concurrence

La clause de non-concurrence représente un aspect important et controversé des contrats de travail. Souvent contestée, cette clause doit respecter certains éléments juridiques essentiels, qui sont à l’occasion ignorés, d’autres fois négligés lors de la rédaction et de la signature des contrats d’embauche.

La clause de non-concurrence dans un contrat de travail est une disposition par laquelle un employé s’engage au moment où il occupe un certain poste au sein de l’entreprise et pour une période après la fin de son emploi, de façon générale, à ne pas faire concurrence à son employeur soit par exemple en démarrant une entreprise dans le même secteur d’activités ou en allant travailler pour un concurrent.

Premièrement, il est important d’apporter une distinction entre la clause de non-concurrence pour les contrats de travail et la clause de non-concurrence stipulée dans des contrats commerciaux qui comportent des exigences et des applications très différentes. Nous nous concentrerons donc sur celle invoquée au sein de contrats de travail.

La clause de non-concurrence fait l’objet d’une attention particulière dans le Code civil du Québec, lequel édicte ce qui suit, à son article 2089 :

2089. Les parties peuvent, par écrit et en termes exprès, stipuler que, même après la fin du contrat, le salarié ne pourra faire concurrence à l’employeur ni participer à quelque titre que ce soit à une entreprise qui lui ferait concurrence.

Toutefois, cette stipulation doit être limitée, quant au temps, au lieu et au genre de travail, à ce qui est nécessaire pour protéger les intérêts légitimes de l’employeur.

Il incombe à l’employeur de prouver que cette stipulation est valide.

La jurisprudence s’est penchée à maintes reprises sur cet enjeu et a établi une définition assez exhaustive présentée par l’honorable Juge Letarte dans l’arrêt (Groupe SNC-Lavalin inc. c. Leboeuf [1994] J.Q. no 1262, à la page 61) :

«  La clause de non-concurrence impose à celui qui s’y est obligé une importante limitation à sa liberté. Elle ne peut être contraire ni à l’ordre public ni aux bonnes moeurs, son application doit être limitée dans le temps et dans l’espace, les restrictions qu’elle impose doivent être proportionnées aux motifs qui la justifient; elle ne doit pas empêcher son débiteur de gagner sa vie. Non limitative, cette liste d’exigences justifie l’interprétation restrictive que la jurisprudence a donnée à ses termes. »

Il est important d’ajouter qu’en raison de l’alinéa 3 de l’article 2089 du Code civil du Québec, le fardeau de prouver que la clause de non-concurrence du contrat de travail est valide, revient à l’employeur. Cela représente une responsabilité de plus pour ce dernier puisqu’il doit justifier l’étendue des restrictions imposées à ses salariés selon les quatre (4) exigences décrites plus haut.

b. Critères d’évaluation

Il est important de noter que la clause de non-concurrence est inopposable à l’employé si l’employeur met fin au contrat de travail sans motif sérieux ou si l’employé résilie son contrat pour de tels motifs.

Cinq (5) facteurs doivent être analysés lorsque nous sommes en présence d’une clause de non-concurrence. En effet, la clause doit être :

  • Écrite

Pour être valide, la clause de non-concurrence doit être présente à l’intérieur du contrat de travail et elle doit être écrite en termes exprès.

  • Limitée quant à la durée

Un employeur ne peut pas restreindre la liberté d’un salarié pour une durée excessive. Il faut donc établir une limite temporelle raisonnable qui conviendra aux deux (2) parties lors de la signature du contrat d’embauche. Historiquement, les tribunaux ont refusé les clauses de non-concurrence d’une durée supérieure à 2 ans. Toute relation professionnelle est unique et donc une analyse de la trame factuelle est de mise, d’où l’importance de bien s’informer auprès d’un avocat compétent!

  • Limitée quant au territoire

La restriction territoriale ne doit pas dépasser les intérêts légitimes de l’employeur auquel cas, la clause pourrait être déclarée déraisonnable et donc susceptible d’être invalidée. Par exemple, l’employeur évoluant strictement dans la ville de Montréal ne pourrait pas stipuler une clause de non-concurrence empêchant l’employé de travailler dans la province de Québec advenant son départ.

Le territoire prévu doit être énoncé de manière très précise. Pour illustrer ce point, les tribunaux ont refusé les termes « et dans les environs », « région métropolitaine de Montréal » et « l’agglomération de la ville de Vancouver », cette dernière décision venant de la Cour suprême du Canada.

  • Limitée quant à la spécificité du travail/poste

L’article 2089 du Code civil du Québec précise que la clause de non-concurrence doit être raisonnable quant au genre de travail prohibé. La limitation doit se faire afin de poursuivre un but légitime pour, par exemple, protéger des secrets commerciaux ou des informations confidentielles. L’employeur ne peut empêcher son employé d’utiliser ses habiletés, ses connaissances et son expérience au profit d’une autre entreprise.

Par exemple, une clause empêchant un serveur de restaurant de travailler dans le domaine de l’alimentation serait trop large et la clause pourrait tout simplement être annulée en entier.

  • Proportionnelle

Finalement, les restrictions imposées par l’article 2089 du Code civil du Québec doivent être proportionnelles au but recherché par l’inclusion d’une clause de non-concurrence. En effet, ce critère se retrouve implicitement dans l’analyse des facteurs de temps, de territoire et de genre de travail.

En effet, plus les motifs justifiant les limitations de liberté s’avèrent importants et sérieux, plus les tribunaux auront tendance à être tolérant vis-à-vis des restrictions significatives que les entreprises imposent à leurs salariés.

Nous n’avons qu’à penser au domaine pharmaceutique où le coût des recherches se chiffre parfois en milliards de dollars. Il est alors primordial de protéger les connaissances et la propriété intellectuelle si chèrement acquises. Ce constat impliquera donc une tolérance plus grande de la part des différents tribunaux qui adapteront leur barème d’évaluation en fonction du contexte, du domaine d’affaires dans lequel évoluent les parties litigieuses et de l’importance du poste occupé par le salarié visé.

Critères d’évaluations de la raisonnabilité

Voici quelques aspects que le tribunal prendra en compte lors de l’évaluation de la raisonnabilité de la clause de non-concurrence contestée:

  • Le poste occupé par l’ex-employé
  • L’importance de son poste au sein de l’entreprise
  • La durée de son emploi
  • Les circonstances dans lesquelles il a commencé son emploi
  • Le domaine d’activité dans lequel l’entreprise évolue
  • Les compétences acquises et les contacts développés par l’ex-employé lors de la durée de son emploi au sein de l’entreprise

Une clause de non concurrence ambiguë doit être interprétée en faveur de l’employé!

Conclusion

En conclusion, lorsqu’une clause de non concurrence est contestée, les tribunaux doivent trouver le juste milieu entre, d’une part, permettre au salarié d’avoir une certaine mobilité au sein du marché du travail et, d’autre part, favoriser la liberté contractuelle qui permet l’inclusion d’une clause de non-concurrence à l’intérieur du contrat de travail.

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Le processus présenté ci-dessus ne constitue qu’un outil de référence et ne comporte aucune garantie relative à votre dossier. Nous vous recommandons fortement de recourir aux conseils juridiques d’un avocat, membre en règle du Barreau du Québec. Les particularités propres à chaque cas d’espèce doivent faire l’objet d’une analyse exhaustive puisque le processus peut s’avérer complexe et techniquement difficile.

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